Valérie Weigel

Directrice technique Europe pour Sibanye-Stillwater, spécialisée dans la métallurgie extractive

Cité des sciences, Paris 19

Valérie Weigel

Partie dans l’industrie des métaux non ferreux depuis des années, Valérie Weigel voit son secteur prendre le tournant environnemental et devenir acteur de la transition énergétique.
Promotion 107 de l’ESPCI Paris-PSL

Elle grandit avec comme modèle un père ingénieur qui, d’origine autrichienne, suit des cours du soir pendant des années pour obtenir son diplôme. A l’école, les sciences deviennent très vite une évidence pour elle et quand il faut choisir une grande école d’ingénieur, Valérie Weigel vise l’ESPCI qui lui semble la plus inspirante. “Je voulais faire de la chimie mais j’aimais l’idée que cette école me permette encore de changer d’avis, qu’elle donne une formation technique poussée assez large, je trouvais bien en tant qu’élève-ingénieure de ne pas être déjà trop spécialisée.” Et elle a bien fait car finalement ce n’est pas en chimie mais en métallurgie extractive qu’elle poursuit son parcours, soit l’industrie qui permet de passer d’une ressource naturelle, d’un minerai, à un métal.

A la sortie de l’ESPCI, Valérie Weigel a cette volonté de trouver des solutions à des problèmes concrets, d’avoir une application pour sa recherche et ses travaux, et se lance donc dans le vaste domaine des sciences appliquées et de l’industrie. “J’ai toujours été animée par le fait d’utiliser mes compétences techniques pour réaliser quelque chose de concret et servir l’industrie.” Elle travaille au sein d’un centre de recherche spécialisé dans l’industrie minière et métallurgique, avant de partir travailler en Allemagne au sein d’une usine de production spécialisée dans la transformation et valorisation de métaux non ferreux. De par ses expériences dans l’industrie en France et en Allemagne, elle note des différences culturelles dans la manière de travailler et les différentes approches : “En Allemagne il y a moins de lutte des classes. Chaque employé est très bien formé et est en général, peu importe son travail, fier de ce qu’il fait. Les rapports sont plus aisés, ce qui n’empêche pas pour autant les revendications, mais l’ingénieur n’est pas forcément un ennemi. Alors qu’en France les relations peuvent parfois être compliquées entre les ingénieurs, les agents de maîtrise et les ouvriers.”

Par la suite, Valérie Weigel devient directrice d’un projet de construction d’une usine sur le recyclage de batteries de véhicules électriques. Elle vient tout juste d’accepter un tout nouveau poste et de devenir directrice technique chez Sibanye-Stillwater, une entreprise qui cherche à se développer en Europe, dans les métaux de la transition énergétique. Un rôle plus managérial, car elle doit désormais gérer des équipes, s’assurer de la pertinence des choix de l’entreprise, de la performance des sites, du respect des normes pour les activités recyclage et de production de lithium, de nickel, cobalt. ; mais aussi mener des évaluations techniques sur les potentielles acquisitions du groupe.

A l’heure où la demande et la vente de voitures électriques explose, savoir recycler les batteries électriques en Europe devient un enjeu de taille. D’autant plus que selon Valérie Weigel, “nous n’avons pas suffisamment de production en nickel, lithium, cobalt. [métaux qui entrent dans la composition des batteries] Il faut donc recycler ce qui existe déjà.” L’industrie du recyclage des batteries électroniques commence par traiter les rebuts de production des usines de fabrication de batteries mais selon Valérie Weigel dans une dizaine d’années il y aura une très grande quantité de batteries usagées à recycler.

Un recyclage complexe car s’il y a beaucoup de matériaux différents dans une batterie, chacun demande à être recyclé d’une manière bien spécifique, et à être envoyé dans une usine spécialiste de cette matière, pour être transformé afin d’être réutilisé et réintroduit dans une usine de production de batterie ou de tout autre chose. Et si certaines matières, comme le plastique, peuvent être recyclées un nombre limité de fois, “les métaux sont les seuls à être recyclables à 100% sans perte et à l’infini. Et ils sont une denrée si précieuse et chère que l’intérêt est de les réutiliser pour refaire des batteries.”

Sur ces dix dernières années Valérie Weigel a vu les usines s’emparer progressivement des questions écologiques et les réglementations européennes et plus locales se renforcer, pour réduire l’impact des industries sur l’environnement. Et depuis, elle estime que 50% de son travail de directrice technique consiste à vérifier que chaque entité respecte bien les consignes environnementales. Elle voit également les projecteurs se tourner sur les matières premières et de plus en plus de chercheurs et d’ingénieurs arriver, alors que ce champ avait progressivement été abandonné. “En Allemagne certaines chaires d’université en métallurgie avaient même failli fermer, passant de 60 à 10 élèves. Aujourd’hui la situation s’est retournée, mais en France nous manquons encore grandement de cursus ou de laboratoires tournés vers la métallurgie.”